Sur un territoire en tension, où des milliers d’emplois peinent à trouver preneur, l’Académie de l’Hospitalité, portée par l’Office de Tourisme de Lens, propose une formation à des personnes éloignées de l’emploi. Une initiative locale qui veut remettre l’humain au cœur du recrutement.
Une réponse concrète à une crise durable
Trouver du personnel en cuisine, en salle ou en réception est devenu un casse-tête quotidien pour les professionnels de l’hôtellerie-restauration. À Lens comme ailleurs, les postes vacants s’accumulent. « On estime à 15 000 le nombre d’emplois non pourvus dans le département », explique Pierre Nouchi, président de l’Union des Métiers de l’Industrie Hôtelière dans le Pas-de-Calais (UMIH).
C’est face à ce constat que Lens Tourisme a lancé l’Académie de l’Hospitalité, une formation de 12 semaines (400 heures) mêlant cours théoriques, modules pratiques et immersion en entreprise. Objectif : remettre en selle des candidats motivés mais éloignés du marché du travail, comme des jeunes décrocheurs, des bénéficiaires du RSA ou des demandeurs d’emploi de longue durée. Quatre métiers sont au programme : commis de cuisine, serveur en salle, agent d’accueil, personnel d’étage.
De la motivation avant tout
Abibou Koundoul, directeur de l’hôtel Louvre-Lens, a immédiatement adhéré au projet : « Moi aussi, on m’a donné ma chance. Je suis arrivé dans la région il y a six mois, et j’ai reconnu dans cette démarche ce que j’aurais aimé vivre au départ. »
Face aux difficultés de recrutement, il rappelle que ce ne sont pas les compétences techniques qui font la différence : « On n’a pas besoin de personnes formées à fond dès le départ. Ce qu’il faut, c’est des gens qui ont envie. Le reste, on peut l’apprendre sur le terrain. »
Il accueillera deux stagiaires dans son établissement, dont une qui sera embauchée à l’issue du parcours, en tant que femme de chambre. Une première victoire pour cette initiative locale.
« C’est une chance, je le prends comme ça »
Du côté des stagiaires, les profils sont variés mais les attentes se rejoignent. Mayline, 19 ans, s’était lancée dans un BTS communication sans réelle conviction. « Ça ne me plaisait pas. J’ai vu passer une annonce sur Facebook, j’ai tenté. Je veux travailler dans l’accueil, la réception. Parler aux gens, les aider, c’est ce que j’aime. »
Pour Amélie, 34 ans, c’est une reconversion assumée : « J’ai fait un peu de tout, même en hôpital. Mais ce que je préfère, c’est la cuisine. J’avais besoin d’un cadre, d’un vrai tremplin. Cette formation, je la prends comme une chance. »
Les deux jeunes femmes commencent leur formation dès ce lundi 29 septembre. Dans cette académie, on y retrouve un restaurant de formation mais aussi trois chambres qui pourront être proposé à la location le week-end.
Une formation pensée avec les professionnels
L’Académie ne fonctionne pas comme une école classique. Tout a été coconstruit avec les entreprises du territoire : sélection des profils, accompagnement en entreprise, promesse d’embauche à la clé.
« Chaque stagiaire est mis en relation avec une structure adaptée, avec un suivi individualisé », précise Sophie Wilhelm, directrice de Lens Tourisme.
La pédagogie est assurée par des formateurs internes et des professionnels du secteur, notamment des intervenants issus des lycées hôteliers partenaires. « On ne vient pas concurrencer les formations existantes » insiste-t-elle. « On agit en complémentarité, pour aller chercher des publics qui ne se retrouvent pas dans les circuits classiques. »
Une première promotion… et déjà une suite
Cette première session, financée pour la première session par le Département du Pas-de-Calais, accueille une douzaine de stagiaires. D’autres sessions sont prévues en 2025 dans le cadre des POEI (Préparations Opérationnelles à l’Emploi Individuelles) avec France Travail.
L’ambition ? Faire de l’Académie un véritable tremplin local, au service de l’emploi et de la valorisation des métiers du tourisme. Un secteur qui, selon Pierre Nouchi, souffre encore de préjugés : « On pense que ce sont des métiers difficiles, peu valorisants… Mais ce sont surtout des métiers de passion, de sourire, d’accueil. Et ici, dans le Pas-de-Calais, on sait ce que ça veut dire. »
Au total, le coût de cet important chantier est de 2,6 millions d'euros pour l'agglo Lens-Liévin. Elle a pu compter sur des subventions du Département à hauteur de 457 820 €, de l’État pour 400 000 € ainsi que de la Région avec 100 000 €. Le fonctionnement de l’Académie repose, lui, sur un budget annuel évalué à 200 000 euros.
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