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"C'est intolérable" : le maire de Béthune en guerre contre le trafic de drogue

Béthune - Bruay. Le maire de Béthune, Olivier Gacquerre revient pour HorizonActu sur le phénomène du trafic de drogue qui gangrène de plus en plus de villes moyennes.

"C'est intolérable" : le maire de Béthune en guerre contre le trafic de drogue
Le maire de Béthune, Olivier Gacquerre - DR Horizon

Début janvier 2025, la police municipale de Béthune a réussi à démanteler un point de deal dans la commune. Les dealers utilisaient des sachets de bonbons pour dissimuler les stupéfiants. Ce trafic de drogue touche et gangrène de plus en plus les villes moyennes. Le maire de Béthune, Olivier Gacquerre, souhaite attirer l’attention sur ce phénomène. Il nous a accordé un entretien.

HorizonActu : Suite au démantèlement d'un point de deal, vous vous êtes exprimé sur les réseaux sociaux. Pourquoi et qu'avez-vous voulu dire ?

Olivier Gacquerre : Ce que j'ai voulu exprimer aux habitants, c’est que nous sommes bien conscients, nous qui gérons nos cités et nos communes au quotidien, des problématiques liées aux dérives sociétales et à l’insécurité. Parmi les deux maux souvent exprimés par les habitants en matière de sécurité et de tranquillité publique, la sécurité routière arrive en premier, mais je constate depuis quelques années, comme tous mes collègues maires de villes moyennes, l’arrivée de commerces illégaux dans plusieurs parties de nos communes, et pas uniquement dans les quartiers populaires.

Nous avons donc immédiatement mis en place des mesures avec notre police municipale, d'abord pour occuper l'espace public. Nous organisons souvent des activités avec des éducateurs et intervenons pour gêner les acheteurs. Nous travaillons beaucoup avec la police nationale, nous avons installé des caméras, équipé un centre de supervision urbain, et en fouillant, en harcelant aussi les vendeurs, nous trouvons des produits illicites qui ressemblent à des bonbons. Surtout, nous nous rendons compte qu'il existe une organisation bien structurée, composée de personnes qui ne viennent pas de Béthune. Elles viennent de l’extérieur, de Creil, du Havre, de Marseille, parfois même de l'étranger.

Ils viennent à Béthune pendant une période donnée et ne connaissent pas forcément la commune. Ils sont là simplement pour distribuer des produits illégaux. Ils sont prêts à vendre la mort, puisque ces produits nuisent gravement à la santé. C’est devenu complètement insupportable pour nous. Mon intervention visait à dire que nous en avons conscience et que nous agissons du mieux que nous pouvons. Néanmoins, il faut aussi que les habitants nous aident, qu’ils dénoncent. On cherche à exploiter la fragilité ou la pauvreté des gens, et je le dis clairement : c’est ce qui se passe.

Aujourd’hui, nous avons des cages d’escaliers où se cachaient des gens. Nous y passons régulièrement pour sécuriser les lieux. Il est donc essentiel que les habitants nous signalent ces dérives. Nous avons installé de la vidéosurveillance à l’entrée de ces immeubles. C’est intolérable de voir ces personnes arriver et tenter nos enfants, les incitant à se droguer ou à les entraîner vers de l’argent facile. Leur proposer de se déscolariser pour ramener un petit billet à la maison, je trouve cela juste honteux. Cela me révolte au quotidien.

HorizonActu : Y-a t-il une crainte pour vous que Béthune devienne un espace de narcotrafic ?

O.G : Les maires sont des gens plutôt calmes et raisonnables. Ceci étant dit, cela ne nous a pas empêchés, lors du dernier congrès des maires à Paris, d'aborder la thématique du narcotrafic. Nous y avons alerté la puissance publique, et elle sait bien ce qu’il se passe. C'est toujours difficile quand on est élu et qu’on parle de ces problèmes dans sa commune, parce que si on n’en parle pas, cela revient à faire croire qu'il ne se passe rien. Cependant, il ne faut pas non plus faire croire que c'est un problème généralisé à l'ensemble de la commune et pour tous les habitants, car c’est complètement excessif et cela donne une mauvaise image de la ville, laissant à penser qu’elle se paupérise, qu’elle est une ville avec des problématiques sociales irréductibles.

HorizonActu : Sur ce fléau du trafic de drogue, vous sentez vous assez épaulé par l'État ?

O.G : En matière de lutte contre le trafic de drogue, nous, à part être en première ligne et assurer la sécurité publique, ne pouvons pas réellement faire plus. La police municipale ne peut pas enquêter, elle ne peut pas mener de surveillance approfondie, elle ne peut pas conduire d’enquêtes. Nous restons donc toujours dépendants de la police nationale. Et c’est vrai que quand les gens sont témoins d’un trafic de drogue, ils n’attendent pas six mois. Je pense qu’il y a vraiment des lourdeurs administratives à lever.

Aujourd’hui, nous ne sommes peut-être pas assez épaulés par l’État, mais je ne vais pas faire comme certains maires et dire qu’il n’y a pas assez de policiers. Ils sont eux aussi débordés. À Béthune, nous avons recruté des policiers, nous en sommes à 22. Aujourd’hui, on harcèle les acheteurs, on harcèle les vendeurs par des contrôles, par notre présence, par la détection de biens et de matériel qu’ils veulent vendre et cacher, et on fait en sorte qu’ils ne s’installent pas, notamment dans une barre d’immeubles. Ce sont des petites entreprises sans aucune règle, qui sont là uniquement pour l’argent, coûte que coûte, et c’est juste incroyable.

HorizonActu : Vous souhaitez aussi mettre l'accent sur la prévention ?

O.G : En effet, je suis atterré par le nombre de consommateurs. C’est un fait de société. Aujourd’hui, de nombreux produits chimiques arrivent sur le marché. Il faut prévenir les parents de ce phénomène pour qu’ils puissent eux-mêmes sensibiliser leurs enfants. J’interpelle aussi celles et ceux qui peuvent être dans une forme d’addiction. Nous avons des centres de soins et d’accompagnement, et il faut aller consulter son médecin et éviter de tomber dans cette facilité qu’est la consommation de drogues. C’est très dangereux et cela ne fait qu'enrichir des personnes dont l'unique objectif est de prendre notre argent et notre santé.

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