Pour beaucoup de supporters du Racing Club de Lens, aller au stade Bollaert sans passer Chez Muriel serait presque impensable. Installé rue Édouard-Bollaert, à deux pas du stade, ce petit café aux couleurs sang et or fait partie du paysage lensois depuis très longtemps. Muriel est derrière le comptoir depuis 46 ans. Mais bientôt, une page va se tourner : Murielle, que tout le monde appelle affectueusement « Mumu », s’apprête à prendre sa retraite.
La gérante emblématique estime que « le moment est venu de profiter un peu ». Une décision compréhensible, mais difficile à accepter pour les habitués, tant ce lieu est chargé d’histoires, de souvenirs et d’émotions. Et à vrai dire, Muriel elle-même n’est pas pressée de partir.
« Non, ce n’est pas mon dernier match », confie-t-elle avant la rencontre Lens–Nice du dimanche 14 décembre. « Il y a encore le match de Coupe de France. » en référence au match de ce samedi 21h face à Feignies-Aulnoye.

Une transmission en douceur
La vente du café est en bonne voie, même si rien n’est encore officiellement signé. Muriel espère rester encore jusqu’au mois de mars, le temps de finaliser la reprise. « Je suis retraitée au mois de janvier, ça c’est sûr. Mais je pense que je serai sûrement là jusqu’au mois de mars », explique-t-elle.
Un repreneur semble avoir retenu son attention, notamment parce qu’il souhaite préserver l’âme du lieu. « Il veut garder mon institution, le garder dans son jus. C’est ce que je voulais. Je voulais que ça reste un café, un club de supporters, un lieu en lien avec le foot. » Une condition essentielle pour Muriel, très sollicitée par des investisseurs ces derniers mois. « J’aurais eu mal au cœur de voir que tout soit abattu, qu’il n’y ait plus un café ici. »
Une histoire de famille et de mineurs
L’histoire de Chez Muriel dépasse largement le cadre du football. Muriel fréquente les lieux depuis 1963. « C’était le fief de mon père. Le fief des mineurs qui allaient au football », raconte-t-elle avec émotion. Quatre générations se sont succédé dans ce café, devenu au fil du temps une véritable famille.
« Ici, c’est la fête. De 3 à 99 ans. Tout le monde s’entend. Quand je vais au foot, je ne vais pas à la guerre, je vais voir un match de football. J’ai toujours voulu transmettre ça. »
Les jours de match, l’ambiance est unique. « Tout le monde se connaît. On s’embrasse, on se dit bonjour, on s’amuse. C’est cette ferveur et cette amitié que je voulais garder. » Même après la vente, Muriel compte rester fidèle au rendez-vous. « Je suis abonnée, donc je viendrai. Les jours de match, je serai toujours là. Au moins, je retrouverai mes amis. »
Une amie pour les supporters
Pour Stéphane, fidèle parmi les fidèles, Muriel est bien plus qu’une patronne de bar. « Muriel, pour moi, c’est comme une grande sœur. Elle rend tellement de gens heureux autour de Lens. Elle mérite le respect. »
Il compare le lieu à un arbre solidement enraciné. « Il y a une racine, un tronc, et nous, on est les petites branches. On vient ici pour trouver une famille. »
L’idée de la voir quitter son comptoir provoque une vive émotion. « Ça fait 30 ans que je la connais. On repousse toujours un peu les étapes. On laisse le temps au temps. »

Une institution qui dépasse Lens
Même les supporters de passage connaissent l’adresse. Lors de notre reportage, François et son père, venus de Versailles pour assister au match, se sont arrêtés Chez Muriel. « On nous a dit que ce bar était une institution, donc forcément, on est venus. »
Alors que le RC Lens réalise une saison remarquable, Muriel nourrit encore de grands rêves. « Gagner la Coupe de France, ce serait magnifique. Mon père en rêvait. Peut-être que ce sera l’année ou jamais… » Quoi qu’il arrive, Chez Muriel restera gravé dans la mémoire collective des supporters lensois. Un lieu de partage, de ferveur et d’humanité, à l’image de celle qui l’a fait vivre pendant près d’un demi-siècle.
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