Protoxyde d’azote : un fléau accessible en “trois clics” que dénoncent des addictologues du Lensois

Actus. Facile d’accès et banalisé, le protoxyde d’azote continue de faire des ravages chez les jeunes. Les addictologues alertent sur un fléau qui se propage à grande vitesse, nourri par une disponibilité quasi immédiate du produit et des dégâts souvent irréversibles.

Protoxyde d’azote : un fléau accessible en “trois clics” que dénoncent des addictologues du Lensois
Des bonbonnes sont très souvent retrouvées au bord des routes - Shutterstock

C’est un gaz qui circule désormais partout : rues, soirées étudiantes, parkings, boîtes de nuit. Le protoxyde d’azote, longtemps perçu comme un simple “gaz hilarant”, est devenu un véritable fléau chez les jeunes. Selon des médecins addictologues de Lens, son succès fulgurant tient d’abord à une raison simple : il est extrêmement facile à trouver.

Un produit en vente libre sur Internet

Pour les docteurs Damien Scliffet et Théo Joseph, addictologues à Lens, le premier problème concerne l’accès au produit.
Le protoxyde d’azote n’est pas seulement présent dans les commerces spécialisés : il se commande en quelques minutes sur Internet, sans contrôle, sans limite, sans avertissement.

« On peut commander en très gros volumes en deux ou trois minutes. Quelques clics suffisent pour recevoir des bonbonnes prévues pour des centaines d’inhalations », déplore le Dr Joseph. Les médecins racontent même avoir fait le test : une simple recherche Google, et des sites apparaissent avec livraison rapide, bonbonnes massives et même… sachet de 100 ballons offert.

Des vendeurs qui se cachent derrière la chantilly

Pour contourner la loi, les vendeurs prétendent que ces énormes contenants servent à préparer “des centaines de portions de chantilly”. Une hypocrisie dénoncée par les addictologues. « Ces bonbonnes ne peuvent pas servir à faire de la chantilly, explique le Dr Scliffet. Elles sont conçues pour que l’on puisse directement adapter un ballon et inhaler le gaz. Tout est pensé pour l’usage détourné. »

Le médecin raconte également que Google lui a proposé, via ses algorithmes, des publicités sponsorisées pour acheter des bonbonnes. « J’ai signalé le produit comme stupéfiant et on m’a répondu que cela ne contrevenait pas aux règles d’utilisation, raconte-t-il. Une visibilité qui, selon lui, banalise totalement le produit. »

Un accès si simple qu’il entretient la dépendance

Le protoxyde d’azote est aujourd’hui le deuxième produit le plus testé par les jeunes, après le cannabis. Son effet euphorisant très rapide et sa redescente tout aussi brutale poussent à recommencer… encore et encore. « La disponibilité majeure, le coût très bas, l’effet de mode… Tout est réuni pour que les jeunes s’y engouffrent », résume le Dr Joseph.

Cette accessibilité instantanée rend aussi plus difficile la prise en charge des addictions. Même après un sevrage à l’hôpital, beaucoup replongent aussitôt chez eux : le produit est à portée de clic.

Des dégâts neurologiques rapides et sévères

Les deux médecins rappellent des conséquences parfois dramatiques : pertes de sensibilité, douleurs dans les jambes, paralysie, AVC… Et ces dégâts arrivent beaucoup plus vite que pour d’autres drogues. « Parfois en six mois seulement, un jeune peut se retrouver dans un état physique catastrophique », prévient le Dr Scliffet.

Agir sur la prévention… et sur l’accès

Pour les addictologues, la solution ne se trouve pas dans la répression. Selon eux, la priorité est de freiner la disponibilité massive, en limitant la vente au grand public, en interdisant les gros contenants et en responsabilisant les plateformes en ligne. En parallèle, ils appellent à renforcer la prévention dans les établissements scolaires, auprès des familles et des professionnels de santé.

“L’addiction est une maladie, l’accès est un problème de société”

Le Dr Scliffet insiste : « Le problème n’est pas le jeune consommateur : c’est la facilité d’accès. Tant que le produit sera aussi simple à obtenir, les dégâts continueront. » Pour les deux médecins, la lutte contre le protoxyde d’azote ne passe pas seulement par l’information : elle passe d’abord par la fin de cet accès illimité, banalisé et omniprésent.

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